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124 LES ANCIENS CANADIENS
Ce sauvage, par une rare exception er au grand regret du
Canadien, était abstème de nature.
- C'eSt bon l'eau-de·feu, dir Talamousse après un moment
de silence en avançant encore la main vers le flacon, que Dwnais
retira.
- Donne, donne, mon frère, je t'en prie; encore un coup,
mon frère, je t'en prie.
- Non, dit Dumais, pas à présent; tantôt.
Et il remit le flacon dans son sac.
- Le Grand-Esprit aime aussi le Canadien, reprit Dumais après
une pause: il l'a visité la nuir dernière pendant SOR sommeil.
- Qu'a-t-i1 dit il. mon frère? demandèrent les sauvages.
Le Grand-Esprit lui a dit de racheter le prisonnier, fit
Dumais.
- Mon frère ment comme un Français, s'écria la Grand'
Loutre; il ment comme tous les visages-pâles: les peaux-rouges
ne mentenr pas eux.
- Les Français ne mentent jamais quand ils parlent du
Grand-Esprit, dit le Canadien.
Et, retirant le flacon du sac, il avala une demi-gorgée d'eau-
de-vie.
- Donne, donne, mon frère, dit Talamousse en avançant la
main vers le flacon, je t'en prie, mon frère.
- Si Talamousse veut me vendre sa parr du prisonnier, fit
Dumais, le Français lui donnera une autre traite.
- Donne-moi toute J'eau-de·feu, reprit Talamousse, et
prends ma parr du chien d'Anglais.
- Non, dit Dumais: un autre coup et rien de plU!.
Et il fit mine de serrer le flacon.
- Donne donc et prends ma part, fit J'Indien.
n saisit le flacon il. deux mains, avala un autre demiard de la
précieuse liqueur, et s'endormit sur l'herbe, complètement ivre.
- Et d'un, pensa Dumais.