Page 29 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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30 LES ANOENS CANADIENS
gros livre, tout latin comme un bréviaire de curé, qu'il appelle
son virgile; ceux donc qui n'avaient qu'un seul œil, tenaient par
la grille deux acolyces qui avaient bien, eux, les damnés, touS
leurs yeux. De tous ces yeux soreaient des flammes qui éclai-
raient l'île d'Orléans comme en plein jour. Ces derniers
semblaient avoir de grands égards pour leurs voisillll, qui
éraient, comme qui dirait, borgnes; ils les saluaient, s'en rappro-
chaient, se trémoussaient les bras et les jambes, comme des
cbcétiens qui font le carté d'un menuet.
Les yeux de mon défunt père lui en sortaient de la t~.
Ce fut bien pire quand ils commencèrent à saurer, àdanser, sans
pouttant changet de place, et à entonnet, d'une voix enrouée
comme des bœufs qu'on éttangle, la chanson suivante:
Allons, gai, compèt' lutin!
Allons, gai, mon chet voisin!
Allons, gai, compèr' qui fouille,
Compèr' crétin la grenouille!
Des chrétiens, des chrétiens,
J'en f'rons un bon festin.
- Ah! les misérables cannibales, dit mon défunt père,
voyez si un honnête homme peut être un moment s(\c de son
bien. Non content de m'avoir volé ma plus belle chanson que
je réservais toujours pour la dernière dans les noces et les
festins, voyez comme ils me l'ont étriquée! c'est à ne plus s'y
reconnaître. Au lieu de bon vin, ce sont des cbcétiens dom
ils veulent se régaler, les indignes!
Et puis après, les sorciers continuètent leur chanson infernale,
en regardant mon défune père et en le coucham en joue avec
leurs grandes dents de rhinocéroJ.
Ah! viens donc, compèr' François,
Ah! viens donc, rendre porquet!
Dépêch'-toi, compèr'l'andouille,
Compèr' boudin, la citrouille;