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NOUS AVONS LU POUR VOUS



        Mariages, dispenses et

        noces dans le Bas-Canada



        Serge Gagnon, Mariage et famille au temps de
        Papineau, Québec, Presses de l’Université Laval,
        2020, 336 pages, 15,95 $ (format poche).

        Paul-François Sylvestre


        En 1993, les Presses de l’Université Laval ont publié Mariage et
        famille au temps de Papineau, un brillant essai de Serge Gagnon.
        Cet ouvrage sur les unions de couples dans le Bas-Canada vient de
        paraître en format poche. La période étudiée par Gagnon va de 1790 à
        1830 et est symbolisée par Louis-Joseph Papineau (1786-1870).

        Cette histoire du mariage occupe une place de choix dans l’histoire de
        l’Église catholique canadienne-française qui, rappelons-le, a exercé un
        contrôle moral et cérémoniel sur le droit des individus de convoler en
        justes noces. L’Église fait aussi figure de médiatrice entre les jeunes
        couples et leurs parents ou entre des conjoints en situation de conflits.


        L’ouvrage traite aussi bien d’endogamie familiale, d’inceste et de
                                                                                               gr
        disparité de classe ou de culture, que de pouvoir épiscopal, de   En une année, Rome accorde à M  de Québec
        cérémonie religieuse et de noce paysanne. Comme il est impossible de   soixante permis de dispense du « second degré de
        tout couvrir dans une recension, j’ai choisi quelques exemples et opté   consanguinité et d’affinité ». Ces dispenses laissent
        parfois pour les plus colorés.                              croire que l’évêque semble avoir compris qu’il était
                                                                    aussi dangereux qu’inutile de résister aux pressions
        Il est sans doute normal que des fiancés n’ayant jamais eu de rapports   populaires. « Si les cousins déboutés décident de
        sexuels fassent face à certaines difficultés d’adaptation. Or, la   faire un enfant, se mettent en ménage, s’unissent
        condamnation du plaisir par une pastorale rigoriste peut déclencher   sans prêtre devant l’autel, […] à quoi sert la rigueur,
        « un processus d’inhibition mettant obstacle à leur épanouissement   sinon à provoquer un mal plus grand que celui qu’on
        sexuel ». D’autre personnes, plus hardies, se confessent d’avoir « pris   a voulu éviter en refusant la dispense? »
        plaisir à faire le devoir, ou simplement d’avoir étreint leur partenaire
        sans avoir beaucoup songé à la procréation ».               Côté noce, Serge Gagnon note qu’une fête a duré
                                                                    trois jours et trois nuits à Charlesbourg en 1820.
        L’auteur nous apprend qu’« Un veuf ne peut marier la sœur (premier   Il fallait plusieurs maisons, l’une pour danser, une
        degré d’affinité) ou la cousine (second degré) de sa femme, ainsi   autre pour dormir, une troisième pour cuisiner et faire
        du reste jusqu’au quatrième degré. » Gagnon souligne comment   ripaille. Cinquante ans plus tard, un riche cultivateur
        M  Joseph-Octave Plessis, évêque de Québec, souscrit à la règle   de Saint-Jean-Port-Joli fit durer trois semaines les
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        médicale selon laquelle les mariages entre cousins germains   noces simultanées de sa fille et de son fils cadet.
        (endogamie) conduisent à « des couples stériles ou des enfants
        débiles ». Il les interdit en faisant planer la menace de l’enfer.   La principale source de l’auteur a été l’abondante
                                                                    correspondance de l’évêque de Québec et de son
        Cette menace ne saurait, cependant, convertir les plus tièdes auxquels   auxiliaire de Montréal avec les curés des paroisses
        M  Plessis s’adresse sans doute à la fin du Petit Catéchisme : « À quoi   bas-canadiennes. L’ouvrage renferme pas moins de
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        s’exposent ceux qui se marient en péché mortel? [... À] attirer sur eux   348 notes de référence et la bibliographie comprend
        et sur leurs enfants la malédiction de Dieu. » L’auteur note que cette   quelque 200 ouvrages. Une véritable bible sur le
        pastorale de la peur laisse plusieurs Bas-Canadiens indifférents.  mariage au Bas-Canada!




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